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Alternatives & Révolutions
13 mai 2013

A propos du documentaire "Staline, le tyran

 

 

 

« Un tableau complexe de la personnalité de Staline »

 

 

 

Serge Wolikow, professeur d'histoire contemporaine à l'université de Bourgogne, a visionné le documentaire

Staline, le tyran rouge. Entretien.

Dans la forme, ce documentaire de 90 minutes présente des images colorisées, des plans, des cartes,

mais pas d'interviews d'historiens... Qu'en pensez-vous ?

Serge Wolikow. On peut d'abord féliciter M6 de ne pas avoir cédé à la mode du docu-fiction ! Concernant

la colorisation des images, elle comporte un risque : celui d'établir un lien de proximité avec des événements

qui datent d'un siècle. Cette colorisation donne le sentiment que la communication était sur le même registre

qu'aujourd'hui, ce qui n'est pas le cas. Quant aux interviews des historiens, elles sont remplacées par un

commentaire très dense fondé sur les recherches récentes. Les auteurs s'appuient sur des travaux historiques

sérieux et mesurés et présentent un tableau assez complexe de la personnalité de Staline. Ils montrent bien

l'évolution du personnage : d'abord au coeur du parti, il s'en éloigne pour finalement incarner l'État.

Peut-on réduire le stalinisme à la folie d'un homme ?

Serge Wolikow. Non, Staline est la pièce essentielle, mais il ne peut résumer le système. Le stalinisme est

une façon de confondre le parti et l'État, d'abolir les débats, les discussions dans le parti ; c'est la conception

même d'un parti-État et d'un parti soumis à une doctrine incarnée par le discours d'un seul homme. Ces

questions ne sont pas posées dans le documentaire. Le récit linéaire suppose que ce qui devait arriver est

arrivé. On ne laisse pas la possibilité au téléspectateur de réfléchir aux interprétations : la révolution russe

était-elle intrinsèquement porteuse du stalinisme ou est-ce la conception de transformation sociale russe

qui a provoqué le recours à des méthodes de coercition ? Par ailleurs, on ne peut pas effacer les valeurs de

liberté et d'indépendance de la Russie qui a eu des pertes considérables pendant la Seconde Guerre

mondiale : 26 millions de morts, un chiffre longtemps caché par Staline...

À propos de comptabilité, le chiffre de 20 millions de morts imputables à Staline fait-il consensus chez

les historiens ?

Serge Wolikow. Ce n'est pas tant le chiffre que la méthode de comptabilité globale qui pose problème.

Le débat consiste à savoir si l'on inclut les famines générées par la politique économique de Staline. Les

politiques de déportations, de collectivisations forcées ont désorganisé l'ensemble du système productif.

Le mépris porté à la paysannerie est évident. Mais, de ce que l'on sait, il ne s'agit pas d'une politique délibérée

de mise à mort des populations par la famine. Il est donc problématique de compter ces morts dans les victimes

du stalinisme. Pourquoi, alors, ne pas ajouter les 26 millions de morts de la Seconde Guerre mondiale

provoqués par les erreurs de Staline ? C'est impossible !

Que reste-t-il dans les archives du Kremlin ?

Serge Wolikow. Il reste les archives Staline, qui sont encore sensibles et d'un accès difficile pour les historiens.

Les recherches des quinze dernières années ont permis de mettre en évidence le rôle personnel extrêmement

fort de Staline dans toute l'organisation de la répression.

Entretien réalisé par Marie Barbier
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