Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Alternatives & Révolutions
4 juillet 2015

Nuit de la détresse chez les éleveurs GÉRARD LE

 

 

Nuit de la détresse chez les éleveurs

 

GÉRARD LE PUILL
VENDREDI, 3 JUILLET, 2015
HUMANITE.FR
Alors que les prairies grillent sous le soleil et que les prix de la viande bovine et porcine n’augmentent comme le prévoyait l’accord du 17 entre les éleveurs , les abatteurs, les transformateurs et les distributeurs, une « nuit de la détresse » a donné lieu à des manifestations d’éleveurs dans plusieurs régions .
Une situation explosive obéissant à des causes convergentes sur fond de spéculation à la hausse ou à la baisse sur les denrées alimentaires est en passe de dégrader de manière durable la situation économique et financière de nombreuses exploitations agricoles françaises spécialisées dans la production de lait, de viande bovine et porcine, voire ovine dans un cours laps de temps.
Pour comprendre de quoi il retourne, il faut savoir que les prix payés aux éleveurs de bovins et de porcs ne couvrent plus les coûts de production depuis plusieurs mois. Ces derniers mois aussi, le prix moyen du lait est tombé à 300€ la tonne. Ce qui ne permet pas de gagner sa vie en travaillant durement dans un métier où il faut traire les vaches deux fois par jour et 365 jours par an.
A l’issue de plusieurs rencontres entre les éleveurs, les abatteurs, les transformateurs et les distributeurs au ministère de l’agriculture, notamment le 17 juin, les trois professions de l’aval s’étaient engagées verbalement à augmenter de 5 centimes d’euros par semaine le kilo de carcasse de viande bovine durant douze semaines consécutives afin de rendre 60 centimes de plus aux éleveurs par kilo. Dans le même temps, il était question de relever de 20 centimes le prix du kilo de viande porcine d’ici la fin de l’été. Or, depuis cette date, les choses ne se sont pas passées comme prévu. Le prix du porc a baissé au marché au cadran de Plérin qui demeure la référence nationale en matière de cotation porcine. Le prix de la viande bovine aurait monté entre 0,5 et 1 centime d’euro en deux semaines au lieu des 10 centimes attendus. 
La canicule devient un facteur aggravant pour les éleveurs avec au moins trois conséquences négatives cumulées. Les prairies se dessèchent au point de ressembler à des paillassons. Quand l’herbe manque, les vaches, les brebis et les chèvres donnent moins de lait et le prix de revient de chaque litre produit augmente car il faut donner plus de grain aux animaux, qu’il s’agisse de céréales secondaires où de tourteaux de soja. Engraisser des bêtes à viande coûte aussi plus cher et les éleveurs sont bientôt confrontés à des choix cornéliens : dépenser plus pour nourrir tout le troupeau où vendre de manière anticipée une partie de ce troupeau pour avoir de quoi payer la nourriture des animaux que l’on choisi de garder.
Cette vente anticipée d’animaux de boucherie en plus de ceux qui étaient déjà prêts à partir met sur le marché plus de viande qu’attendu, surtout que les consommateurs se tournent vers davantage produits frais et cuisent moins de viande. Ils achètent aussi moins de fromages, ce qui n’incite pas les laiteries à relever le prix du lait qu’elles collectent et transforment. Qu’ils produisent de la viande ou du lait, les éleveurs sont alors soumis à une double peine sans avoir commis la moindre erreur de gestion : le prix de revient de ce qu’ils produisent augmente en raison d’un coût plus élevé de l’alimentation du bétail ; le prix de vente de leurs produits diminue en raison d’une offre supérieure à la demande qui conduit les distributeurs à rechercher un effet d’aubaine dans une spirale de spéculation à la baisse.
Afin de sensibiliser les consommateurs, le gouvernement et les « partenaires économiques » que sont les abatteurs, les transformateurs et les distributeurs aux difficultés qu’ils rencontrent, les éleveurs conduisaient la nuit dernière une opération baptisée « la nuit de la détresse » dans plusieurs régions de France. Elles étaient conduites par des organisations de la FNSEA et Jeunes Agriculteurs. Ce fut le cas avec un défilé de tracteurs entre Lamballe et Saint-Brieuc dans les Côtes d’Armor, du côté de Quimper dans le Finistère, devant un centre Leclerc à Saint-Etienne de Monluc en Loire Atlantique, mais aussi à Mont-de-Marsan, Périgueux et Rodez notamment.
 
On peut penser qu’il y en aura beaucoup d’autres. Car les difficultés de l’élevage vont durer beaucoup plus longtemps que la canicule. La terre est tellement sèche que l’herbe restera rare tout au long de l’été, voire au-delà. Mais la sécheresse touche aussi une bonne partie de l’Europe ainsi que le Canada tandis que les régions céréalières du Midwest aux Etats Unis sont soumises à des pluies incessantes qui empêchent la moisson de se dérouler dans de bonnes conditions. Dans les deux cas, la récolte céréalière sera moins abondante que prévu. Il n’en fallait pas plus pour que les prix des céréales bondissent de 24% en deux semaines à la Bourse de Chicago, celle qui donne le signal de la spéculation planétaire à la hausse dès qu’apparaît un risque de pénurie céréalière, ce risque fut-il mineur à ce moment de l’année 2015. La nourriture du bétail va donc coûter plus cher dans peu de temps.
Dans ce contexte, les chiffres annoncés par l’INSEE le 2 juillet faisant état d’une amélioration du revenu moyen des paysans de 20,8% en 2014 par rapport à 2013 font grincer des dents dans les campagnes. Car on oublie souvent de rappeler que ce revenu avait baissé de 27,5% en 2013 par rapport à 2012, selon le même Institut. 
Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Albums Photos
Alternatives & Révolutions
Pages
TWITTER
jcS @Revocit

L'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes - Karl Marx-gauchedegauche.canalblog.com .

http://gauchedegauche.canalblog.com

     
Publicité