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Alternatives & Révolutions
22 avril 2015

Le Front national, xénophobe à souhait et

Le Front national, xénophobe à souhait
         et antisocial à sang froid

 

OLIVIER MORIN, GÉRALD ROSSI ET AURÉLIEN SOUCHEYRE
MARDI, 21 AVRIL, 2015
L'HUMANITÉ

Aux antipodes de celui du PCF, le programme économique et social du Front national, masqué derrière un discours faussement antilibéral, dévoile à bien y regarder sa véritable nature fasciste et anti-ouvrière.

Au-delà des valeurs morales, dont sa défense de la peine de mort, le Front national souhaite déployer tout un arsenal de mesures économiques et ­sociales qui le place à milles lieues du PCF. Retour sur des points clés du programme frontiste actuel qui révèle son opposition aux fondamentaux antilibéraux de la gauche dont il se pare.

1. ennemi des travailleurs et des luttes sociales

Malgré un vernis social tenace, le Front national ne prône pas autre chose que la collaboration de classe à même de diviser le salariat. C’est tout l’objet de sa proposition de « réserve légale de titres », qui consiste à « reconnaître au personnel une part de propriété, sans droit de vote, mais permettant le versement de dividendes ». Tordant sans vergogne le principe de propriété collective des moyens de production, ce dispositif a pour conséquence de pourrir les luttes en entretenant l’illusion d’une participation aux décisions de l’entreprise (inexistante de fait par la non-reconnaissance du droit de vote à l’assemblée générale des actionnaires). Dans le même esprit de division, il s’agit de différencier la situation des fonctionnaires par la mise en place d’un système « permettant une modulation du point d’indice ». Une individualisation des parcours propre à décrédibiliser la lutte collective, comme le rappelle la CGT. Organisation syndicale de lutte que le parti frontiste veut supprimer au profit de syndicats « moins tentés de recourir à un rapport de forces ».

2. L’ami des patrons et du système capitaliste

Le FN veut s’attaquer à la fraude. Mais à celle supposée des citoyens, pas à celle des capitalistes. Feignant de vouloir soutenir la Sécurité sociale, il prétend « lutter sans merci contre les abus ». S’appesantissant avec force détail sur les « arrêts de confort » et « les cartes Vitale en surnombre ». Mais il ne dit rien des fraudes aux cotisations sociales dont se rendent coupables les employeurs et qui compteraient pour 20 à 24 milliards d’euros (contre 2 à 3 milliards pour les premières). Dans un chapitre nommé « L’allégement du coût du travail », le parti extrême montre qu’il est bien à droite puisqu’il propose une diminution des cotisations sociales salariales afin d’augmenter les salaires en net. Au final, il prend d’une main le salaire socialisé (mettant en danger le système de retraite) et le redonne de l’autre au travailleur. Permettant ainsi au patronat d’augmenter sa plus-value. Tout en marmonnant en une ligne que « la condamnation de la fraude fiscale sera renforcée », histoire de ratisser large. Il revendique en outre la simplification du bulletin de salaire, une place plus importante à l’esprit d’entreprise dans les programmes scolaires et l’apprentissage dès quatorze ans. Comme aurait pu le faire le CNPF (Conseil national du patronat français, ancêtre du Medef) dans les années 1970.

3. Priorité nationale, poison présenté comme vertu

Le FN, qui veut un « État fort », propose « la mise en place d’un ministère de l’Intérieur, de l’Immigration et de la Laïcité ». Curieux attelage qui ne fait guère mystère de la philosophie constante de ce parti, dont l’historien Nicolas Lebourg rappelait récemment dans le Monde la nature « altérophobe, c’est-à-dire qu’il vit dans la peur de la différence, de l’autre ». De fait, le FN dénonce « une immigration massive (qui) met mal à l’aise notre identité nationale et amène avec elle une islamisation de plus en plus visible, avec son cortège de revendications ». Ce qui le conduit à promouvoir « l’application de la priorité nationale ». Il envisage par exemple une loi qui « contraindra Pôle emploi à proposer toujours à compétences égales les emplois disponibles aux demandeurs d’emploi français ». Cécile Alduy, professeure de français à l’université de Stanford (Californie), note que le programme du FN propose non seulement de renégocier la Convention européenne des droits de l’homme, mais aussi, encore plus fort, d’inscrire le principe de la « préférence nationale » dans le préambule de la Constitution française. Dans la foulée, le FN, qui imagine abroger diverses lois comme celles sanctionnant les discriminations et propos racistes (lois Pleven de 1972 et Gayssot de 1990), se propose également de réformer « en profondeur le Code de la nationalité française », et dans la même veine, parle de la « suppression des pompes aspirantes de l’immigration clandestine, telle que l’aide médicale d’État » destinée, on le sait, aux plus démunis… Et parce que le diable se niche, dit-on, dans les détails, les élus du FN tentent çà et là de mettre en pratique leurs théories. Comme le maire des 13e et 14e arrondissements de Marseille, qui voulait réclamer une carte nationale d’identité aux familles souhaitant assister au spectacle de fin d’année de la mairie.

4. Défenseur d’une austérité à la française…

Les immigrés seraient les premiers touchés si le FN parvenait un jour au pouvoir en France. Comme exposé plus haut, ceux qui ne disposent pas de la nationalité française se verraient relégués en termes de droits généraux, mais aussi d’accès aux soins, au logement social, etc. Si le FN explique vouloir « restaurer l’équilibre des comptes sociaux en donnant la priorité aux Français », il doit bien se douter quelque part que cela ne suffira pas, à moins qu’il ne se soit autoconvaincu de son mensonge comptable à force de diversions xénophobes. D’autres mesures économiques pour redresser la France sont ainsi consignées dans son programme. Elles préparent à n’en pas douter une cure d’austérité que ne renieraient ni l’UMP ni l’actuel gouvernement dit socialiste. Pour commencer, le FN entend « rationaliser le fonctionnement des services publics marchands » pour assurer, dit-il, leur « rétablissement (…) dans la mesure où la situation budgétaire le permettra ». Voilà qui est bien vague… Plus concrètement, le FN entend imposer aux collectivités territoriales de « maîtriser leurs effectifs » via un « plan de réduction ou de stabilisation » soumis chaque année aux préfets. En parallèle, les départements et les régions se verraient perdre 2 % de dotations d’État « dès la première année du mandat », soit une ponction de quasiment 10 milliards d’euros en cumulé à l’échelle d’un septennat (dont le FN souhaite le retour), à condition que cette baisse initiale de 2 % ne soit pas aggravée par la suite… Le FN prévoit également, comme il l’a déjà fait dans les quelques villes conquises en 2014, de s’attaquer à la vie associative, qui connaît selon lui « un développement non contrôlé (…) nourrissant aussi des veaux gras dont l’adéquation avec les attentes des Français n’est pas toujours évidente ».

5…et d’une austérité à la sauce européenne

Mais la mesure austéritaire la plus emblématique de toutes prônée par le FN est celle de l’instauration de la fameuse règle d’or. Dans son programme, le parti d’extrême droite explique que « la maîtrise dans la durée de l’endettement public sera inscrite dans une loi-cadre qui instaurera à terme l’obligation d’un déficit structurel égal à zéro afin qu’aucune mesure budgétaire ne soit gagée par la croissance ». À quoi bon dénoncer l’austérité de Bruxelles et d’Angela Merkel, si c’est pour au final défendre ce qu’elle appelle de ses vœux avec Nicolas Sarkozy ? À quoi bon parler d’un renouveau économique, alors que cette règle (appliquée avec 0,5 % de tolérance en France) corsette les politiques publiques et grève les budgets en obligeant la France à réaliser des économies radicales ? Le FN, avec cette règle, serait dans l’impossibilité de réduire l’austérité. Son programme ne serait donc que mensonges ? Bernard Monot l’avoue ouvertement. Le député européen et stratège économique au FN se définit lui-même comme « libertarien économiquement ». C’est-à-dire qu’il rejette toute intervention de l’État dans l’économie. Le FN, quand il prône de possibles nationalisations et un État interventionniste, ne fait donc rien d’autre que jouer les partis antisystème sans l’être.

(1) Marine Le Pen prise aux mots, de Cécile Alduy et Stéphane Wahnich. Le Seuil, 2015.

Attention, présence d’édulcorants de synthèse.  S’il est une chose qui a changé au FN, ce sont les mots. Attiré par le pouvoir comme les papillons par la lumière, le parti d’extrême droite a normalisé son discours. En tout cas, par la voix de la fille Le Pen. Et les immigrés, dénoncés par le père, se muent en « mondialisme ». Le féminisme est un thème nouveau, dévoilant un opportunisme intrinsèque à l’extrême droite historique. « Le fait d’être une femme la rendant plus crédible sur le droit des femmes », analysent Cécile Alduy et Stéphane Wahnich dans Marine Le Pen prise aux mots (1). Cet édulcorant indigeste ne cache pas longtemps l’aversion du parti pour l’avortement et son désintéressement pour l’égalité salariale. Usant de la figure elliptique, les termes de minorités, communautarisme et le principe de laïcité sont invoqués pour éviter de pointer trop visiblement du doigt les musulmans.

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