La der des ders... Chaque fois qu'une réforme des retraites est lancée - sept depuis 1993 -, on assure
que c'est la bonne et qu'enfin salariés comme retraités pourront vivre tranquille. Chaque fois, les promesses
s'envolent et les gouvernants aggravent les ponctions, sans jamais s'interroger sur la nocivité de la potion
qu'ils font ingurgiter à intervalles réguliers, depuis deux décennies.
Plus habiles que leurs prédécesseurs, le président François Hollande et son premier ministre ont laissé
leurs experts multiplier les propos alarmistes, avant de présenter ensuite leur mixture comme un moindre
mal. Mais si la posologie est (un peu) allégée par rapport aux annonces intempestives, elle n'en est pas
moins dangereuse. Sa philosophie ? Travailler plus pour toucher moins, et sans attendre, payer plus.
Tous les salariés sont touchés, mais les plus jeunes et les plus anciens, c'est-à-dire les retraités, sont
les plus pénalisés. Le capital est totalement épargné. La seule mesure franchement positive concerne
la pénibilité. Toutefois, pour les travailleurs les plus exposés aux problèmes de santé, elle ne fait que
réparer les dégâts liés au recul de l'âge de la retraite à 62 ans - décidé par la droite et M. Nicolas Sarkozy,
condamné par le Parti socialiste quand il était dans l'opposition mais maintenu par les élus socialistes
désormais majoritaires (sauf pour les très longues carrières).
Idées fausses pour mauvaises solutions
Avant même d'entrer dans le détail des mesures, on peut s'interroger sur la dramatisation des déficits
et l'inquiétude permanente instillée dans les têtes. Certes le trou existe, mais il n'est pas abyssal :
4,5 milliards d'euros sur 98 milliards de cotisations versées. Il est principalement dû à la récession
(et non à un problème structurel). D'ici 2020, il tutoiera 1 % du produit intérieur, soit un peu plus
de 20 milliards. C'est l'équivalent de ce que le gouvernement vient d'offrir sur un plateau au patronat
au nom du plan compétitivité. Sans obligation aucune pour les dirigeants d'entreprise en matière
d'emploi, de salaire ou même de formation. Sans que la question du financement n'ait troublé qui
que ce soit. Ce qui est possible pour les patrons ne l'est plus pour les salariés ou les retraités ?
Nul ne nie l'augmentation du nombre de personnes de plus de 65 ans. Mais la vague grise n'a rien
d'une déferlante : nous ne sommes ni en Allemagne ni au Japon . D'une part, la France a une
démographie dynamique et disposera donc à l'avenir d'une population active en augmentation.
D'autre part, elle connaît une productivité du travail parmi les plus élevées du monde. Si, comme
on nous le répète souvent, il y avait effectivement 2,5 actifs pour 1 retraité en 1970 contre 1,5 actif
d'ici 2020, ce dernier produit aujourd'hui plus que les 2,5 d'antan . Du point de vue des richesses
disponibles pour les retraites, il n'y a donc pas de pénurie. Contrairement à ce que prétendent les
apôtres de l'apocalypse, l'actif de demain ne sera pas pressuré par les vieux à venir.
En fait, si le président Hollande s'est ainsi précipité, ce n'est pas pour « sauver le système de retraite »,
menacé d'aucune faillite, mais pour répondre aux injonctions de Bruxelles et des agences de
notations qui réclament une réduction des dépenses publiques et notamment des retraites par
répartition (...)